Pour le premier mai, nous sommes allés manifester à Kreuzberg, un quartier de Berlin qui a connu son temps de squats autogérés, de mouvements alternatifs et révolutionnaires, et d’émeutes, dans LA manifestation anticapitaliste organisée par différents groupes. Cette manifestation est connue pour son agitation, et c’est donc devenu un rendez-vous annuel entre manifestantEs et forces de l’ordre. Les prochains billets seront une description de ce que j’ai vu et vécu. Je finirai par une analyse partielle de nos manifs à nous en prenant celle de Kreuzberg comme point comparatif.
LE REGROUPEMENT
Fouille polie, mais ferme à l’arrivée sur le site de départ. Les forces de l’ordre disaient « bitte (s’il vous plait)». Interdiction de masques, de cagoules et d’objets pointus.Et plein d’uniformes sur les toits tout autour.
Sur le site il y avait toute sorte de gens de tous les âges et de plusieurs provenances politiques différentes. Il y avait aussi des enfants et des bébés dans des poussettes. Il y a eu des discours pas très longs et dans plusieurs langues différentes. Il y a même eu deux discours différents venant de deux camions installés un à côté de l’autre. Nous n’avons pas trouvé ça très poli…
LA MANIFESTATION
Je n’ai jamais participé à une manifestation de ce genre. La puissance, la vitesse, l’autorégulation.
Il n’y avait aucune police, aucun personnage avec un petit dossard pour nous dire ou aller. Personne pour encadrer la manifestation. Mais croyez-moi, elle n’avait besoin de personne pour l’encadrer. J’avais l’impression que le trajet était connu des autorités; les rues étaient vides de voitures et il y avait des forces de l’ordre pour nous attendre vers la fin, mais avant ça les participantEs étaient complètement seulEs. Devant, au moment de bouger, il n’y avait plus d’enfants, plus de poussettes. Il semblerait qu’il y a un temps et un lieu pour tout.
Ça allait vite. On marchait très vite. En voulant prendre une photo de la bannière de tête, nous nous sommes retrouvés en avant avec des gens qui portaient foulards, lunettes de soleil et capuchons noirs. Comme quoi l’interdiction de porter des masques n’empêchait en rien le black block de cacher leurs visages. Ils et elles étaient vraiment beaucoup. Beaucoup plus que je n’en ai jamais vu en même temps dans n’importe quelle manif montréalaise. Nous sommes restés là un petit bout à scander des slogans anticapitalistes. C’est mon côté touriste, mais gueuler en allemand je trouve que ça donne du punch.
Fait intéressant; nous n’avons arrêté nulle part en cours de route. Pas de regroupement devant telle ou telle bâtisse symbolisant ce contre quoi nous étions. Pas de discours, pas de raison de se séparer ou de perdre le rythme. J’ai adoré.
La vitesse, le fait qu’on prenait toute la rue et les deux trottoirs, la force des voix mis en commun, le fait que quand je me retournais je ne voyais ni la fin, ni les forces de l’ordre, mais une mer de noir et de rouge, tout ça m’a donné la chair de poule. Sérieux.
Nous nous sommes déplacés à l’intérieur de la manif. Plus loin derrière il y avait des camions qui crachaient de la musique, des groupes communistes, socialistes, latinos, des clowns maquillés, des anarchistes... On voyait les visages; des jeunes adultes, des moins jeunes, et de tout jeunes adolescentEs.
Je n’ai vu personne casser quoi que ce soit, personne hésiter à une intersection, personne hésiter à prendre la rue.La manif a arrêté aussi brusquement qu’elle avait commencé, nous étions à une intersection de plein de rues qui est aussi dans une grande place ouverte avec plein de bars et de clubs qui jouaient de la musique. Des restaurants et des snack-bars étaient pleins de gens, curieux, mais qui ne semblaient pas du tout apeurés, sur leurs terrasses et nous les frôlions en nous demandant ce qui allait se passer maintenant.
1 commentaire:
Il y a pratiquement un fossé culturel dans nos manières respectives de manifester!
Ça paraît que la police allemande a plus d'expérience que la SPVM, en tout cas.
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